Or, gouvernance et opacité : le paradoxe soudano-tchadien

Lundi 13 Octobre 2025

Le régime tchadien est régulièrement cité parmi les plus corrompus au monde. Cette réputation a conduit plusieurs bailleurs internationaux à se retirer du Plan national de développement (PND), pourtant promu par les autorités lors de forums organisés aux Émirats arabes unis.
Par Dr. Ahmat Yacoub Dabio
Président du CEDPE et de LSF


Entre janvier et septembre 2025, le Soudan a exporté 55 tonnes d’or, générant 909 millions de dollars de recettes, selon les autorités de Khartoum. En 2024, la production nationale avait déjà dépassé les prévisions, atteignant 64 tonnes au lieu des 60 attendues. En période de stabilité, le pays produit en moyenne 90 tonnes par an, dont près d’un tiers — soit 30 tonnes — provient des activités de la milice des Forces de soutien rapide (FSR).
Les autorités soudanaises annoncent que les revenus issus de l’or seront réinvestis dans la reconstruction des infrastructures détruites par la guerre, avec une priorité accordée à la santé, à l’éducation et à l’agriculture. Cependant, la milice des FSR continue d’exploiter des mines aurifères aux confins de la Centrafrique, sans divulguer les recettes générées par cette manne parallèle.
Au Tchad, la transparence sur les revenus issus de l’or et du pétrole reste problématique. La semaine dernière, le ministre des Finances a reconnu que plus de 2 000 milliards de dollars d’or sont exportés vers les Émirats arabes unis via l’aéroport de N’Djamena. L’or de Miski, en partance vers la Libye, représenterait à lui seul 2 736 milliards de FCFA par an, selon une déclaration du maréchal Mahamat Idriss Déby en 2022. Il avait alors admis qu’une partie de cet or quitte le pays de manière frauduleuse, à hauteur de 57 milliards de FCFA par semaine.
Le régime tchadien est régulièrement cité parmi les plus corrompus au monde. Cette réputation a conduit plusieurs bailleurs internationaux à se retirer du Plan national de développement (PND), pourtant promu par les autorités lors de forums organisés aux Émirats arabes unis.
Dans une capitale privée d’eau potable, d’électricité et de routes praticables, où les caniveaux rappellent ceux du XVIIIe siècle, les détournements estimés à 27 000 milliards de FCFA — soit 45 000 milliards de dollars — illustrent un gouffre entre les ressources disponibles et les conditions de vie réelles.