Connectez-vous S'inscrire
Menu

Le redéploiement de Daech dans le Lac Tchad et l'espace du G5S est une source d'inquiétude.

Vendredi 27 Août 2021

Apparemment, des dizaines de combattants de Boko Haram qui refusent de prêter allégeance à Elbarnawi, le nouveau homme fort, se rendent à l'armée nigériane, selon une source sécuritaire. Cette semaine, l’armée nigériane a annoncé la reddition d’un millier de combattants.


euronews
euronews

Quatre mois après la mort de son leader charismatique, Abubakr Shekau, l’étau semble se resserrer autour de Boko Haram après ses multiples défaites militaires face à l’Iswap (version Daech en Afrique de l’Ouest). Apparemment, des dizaines de combattants de Boko Haram qui refusent de prêter allégeance à Elbarnawi, le nouvel homme fort, se rendent à l'armée nigériane, selon une source sécuritaire. Cette semaine, l’armée nigériane a annoncé la reddition d’un millier de combattants.
Fin juin, l’Iswap a déjà lancé un ultimatum d’un mois aux combattants de Boko Haram afin de rejoindre son groupe ou de quitter les maquis. Acculé, par l’obsession de Elbarnawi de vouloir tout contrôler, Bakoura Modou, qui a d’ailleurs envoyé un émissaire pour solliciter des négociations, n’a pas échappé à une offensive militaire de l’Iswap, début juillet, faisant de nombreux morts dans les rangs des deux factions. Ces affrontements l’ont sérieusement affaibli et sous la pression militaire, beaucoup de combattants de Shékau et de Bakoura ont soit prêté allégeance au groupe de l’État islamique en Afrique de l’Ouest, soit se rendre aux forces de l’ordre. 
 
Il semble aussi que Bakoura Modou, dit Sahaba, le successeur présumé du groupe de Boko Haram peine à assoir son autorité sur ce qui reste de combattants de son ancien rival Shékau, mort en mai dernier lors de combats avec le groupe de l’Etat islamique en Afrique de l’Ouest, l’Iswap. El Barnawi, le nouvel homme fort, qui a fait scission de Boko Haram en 2016 et qui dirige désormais l’IswapDaech version Afrique de l'Ouest, a obtenu l’adhésion d’un nombre important de combattants et d’un soutien de taille en matériel de la part des instances dirigeantes de Daech. Sa stratégie vise à profiter de la saison pluvieuse pour faire passer sous son contrôle les territoires autrefois acquis aux deux tendances rivales. L'Iswap prétend lancer après la saison pluvieuse une grande offensive contre les positions des forces "ennemies" dans l'espoir de reconquérir de nouvelles villes comme GambarouBanki et Maiduguri la capitale du Nord du Nigéria. Après sa cuisante défaite en Syrie et en Iraq, et après l'adhésion d'une bonne partie des éléments de Shékau et de BakouraDaech est en train de renaître de ses cendres pour renforcer ses positions dans la forêt de Sambisa, dans le nord-est du Nigeria et se rapprocher de plus en plus des frontières nigériennes, tchadiennes et camerounaise où se trouve son nouveau rival successeur de Shékau, mort en martyr selon Bakoura Sahaba qui a promis le venger, qualifiant Albarnawi d'un agresseur pervers.
Après la perte de leurs fiefs en Irak, Syrie, Libye et Afghanistan, le redéploiement de Daech dans le Lac Tchad et l'espace du G5S doit être une source d'inquiétude pour les Etats concernés et la communauté internationale. Il convient de rappeler une fois de plus que la réinsertion des désassociés reste un défi majeur à relever. À ce jour, il n y a aucune stratégie sérieuse pour la réinsertion des désengagés dont le nombre est estimé à 7 000 personnes parmi lesquelles 54 % de femmes, et la majorité est jeune entre 18 et 30 ans. 94,49 % n’ont pas de pièce d’identité et 96,81 % n’ont aucun niveau d’étude.
 
Autant les multitudes de conférences, ateliers, colloques, séminaires, forum ou réunions sur la thématique relative à l’extrémisme violent sont nécessaires pour dégager une stratégie commune axée sur la phénoménologie et la typologie, autant, il est temps, voire urgent de passer à des grandes actions plus pratiques.
Dans le cadre du programme de Désengagement, « Désassociation », Réintégration et Réconciliation (DDRR) qui consiste à apporter un appui au gouvernement du Tchad en vue de l’élaboration des cadres, des plans de mise en œuvre et des stratégies de gestion des anciens associés « à faible risque » du groupe Boko Haram, le CEDPE a effectué, fin 2019, une deuxième mission de recensement et d’études dans la province du Lac. Il s’agit d’établir une cartographie visant à faciliter la réintégration des désengagés et leur réconciliation avec les communautés aux niveaux institutionnel et communautaire. Cette mission a réalisé le profiling de 2544 sur une estimation de 4 142 désengagés présents dans la province du Lac au Tchad et dont le nombre atteindra 7 000, fin 2021. Autrement dit, au moins 1 598 personnes n’ont pas encore été profilées. Une base de données riche de 15 264 pages, à raison de six pages d’enquête par désengagé, a été remise à la Ministre tchadienne de la Femme. Le coût de la réinsertion d’un désengagés est évalué à 14 000 FCFA soit 23,94 $ Dollars Américain par nuitée.
 
Source cedpe pour tout contact : yacoubahmat@aol.com