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Le rôle de la femme dans la prévention des conflits

Lundi 26 Juin 2023

Le rôle de la femme dans la prévention des conflits et la promotion des valeurs démocratiques. Les exposés des panélistes de la table ronde du 27 juin 2023 qui aura lieu au CEFOD à 9H. Les participants peuvent déjà avoir une idée pour échanger avec les panélistes le jour de la conférence.


 
Le rôle de la femme dans la société tchadienne de nos jours : états des lieux.
Par Jean-Bosco MANGA, Juriste-Journaliste-Ecrivain
 
  1. INTRODUCTION GENERALE
Dans cette introduction, nous situerons le contexte du sujet ainsi que la problématique liée au rôle de la femme dans la société tchadienne de nos jours.
  1. Contexte du sujet
Le Tchad est un pays d'Afrique centrale avec une population d'environ 15 millions d'habitants. La société tchadienne est très diverse, avec de nombreuses cultures et ethnies différentes, chacune ayant ses propres traditions et normes sociales.
De nos jours, le rôle de la femme dans la société tchadienne est complexe et varie considérablement selon les régions, les religions, les traditions et les niveaux d'éducation. Dans certaines zones rurales, les femmes ont des rôles traditionnels définis, tels que les travaux domestiques et le soutien à la famille, tandis que dans les zones urbaines, les femmes ont de plus en plus accès à l'éducation et à l'emploi.
Malgré cela, les femmes tchadiennes sont souvent confrontées à des obstacles importants, notamment en matière d'accès à l'éducation, de santé et de participation politique. Le taux d'analphabétisme des femmes est élevé, ce qui limite leurs opportunités d'emploi et leur impact sur les décisions familiales et communautaires.
En outre, la violence à l'égard des femmes est un grave problème au Tchad et il est souvent difficile pour les femmes de faire valoir leurs droits ou de demander de l'aide. Les femmes sont également sous-représentées dans les postes de direction et de prise de décision dans les secteurs public et privé.
Cependant, il existe des initiatives visant à améliorer la situation des femmes au Tchad, notamment des programmes d'éducation, des campagnes de sensibilisation à la violence contre les femmes, et des efforts pour encourager la participation des femmes à la politique et à l'administration publique.
  1. Présentation de la problématique
La problématique du rôle de la femme dans la société tchadienne de nos jours implique une analyse de la place et de l'influence de la femme dans la société tchadienne contemporaine. Cette question est importante car elle soulève des enjeux sociaux, économiques et politiques importants, tels que l'égalité des sexes, l'accès à l'éducation, aux soins de santé et à l'emploi pour les femmes, ainsi que leur participation à la vie politique et sociale du pays.
Ainsi, l'état des lieux de la situation actuelle des femmes tchadiennes permettrait de mieux comprendre les défis auxquels elles sont confrontées, notamment en termes d'inégalités, de discriminations et de violences de genre. Il serait également intéressant de se pencher sur les initiatives prises par les autorités, les organisations de la société civile et les femmes elles-mêmes pour améliorer leur condition et leur statut.
L'étude du rôle de la femme dans la société tchadienne de nos jours est pertinente pour comprendre les dynamiques sociales et politiques du pays, ainsi que pour identifier les actions à mettre en place pour promouvoir l'égalité des sexes et le développement inclusif et durable.
II. HISTORIQUE DU RÔLE DE LA FEMME DANS LA SOCIÉTÉ TCHADIENNE
Nous évoquerons, dans cette deuxième partie, le rôle traditionnel de la femme dans la société tchadienne et son évolution.
2.1. Rôle traditionnel de la femme dans la société tchadienne
Dans la société traditionnelle tchadienne, le rôle de la femme était généralement défini par les normes et les pratiques culturelles de la communauté. Les femmes étaient considérées comme les gardiennes du foyer et étaient chargées de s'occuper des enfants, de préparer la nourriture et de s'occuper des tâches ménagères.
Cependant, les rôles des femmes variaient selon les groupes ethniques et les régions du Tchad. Certaines femmes avaient des rôles plus actifs dans la société, comme les femmes nomades qui participaient activement à la recherche de nourriture et d'eau pour leur famille. Les femmes dans les communautés agricoles avaient également des rôles importants dans la production alimentaire et agricole.
Dans certaines régions, les femmes avaient également des responsabilités dans la prise de décision communautaire, mais cela était rare et dépendait des normes culturelles locales.
Malheureusement, les femmes étaient souvent victimes de discrimination et de violences, notamment les mariages forcés, les mutilations génitales féminines et les violences domestiques. Cependant, il y a eu des progrès dans la reconnaissance des droits des femmes et de leur rôle dans la société tchadienne moderne.
2.2. Évolution du rôle de la femme dans la société tchadienne
Le rôle des femmes dans la société tchadienne a évolué au fil du temps, mais il reste encore beaucoup à faire pour atteindre l'égalité des sexes.
 
Traditionnellement, les femmes tchadiennes ont exercé des rôles domestiques et ont été responsables de l'éducation des enfants. Elles ont également participé à des activités économiques, telles que la vente de produits agricoles, mais ont souvent été limitées par des normes sociales strictes qui ont limité leur accès aux ressources et aux opportunités.
Au fil du temps, les femmes tchadiennes ont commencé à s'organiser pour promouvoir leurs droits et leur autonomisation. Les différentes constitutions et lois, sous l’ère démocratique, ont garanti l'égalité des sexes et interdire toute discrimination fondée sur le sexe.
Depuis lors, des efforts ont été déployés pour promouvoir l'éducation des filles et des femmes, leur accès à des emplois rémunérés et leur participation à la vie politique.
Cependant, malgré ces avancées, les femmes tchadiennes continuent de faire face à de nombreux défis, notamment la violence domestique, les mariages forcés et précoces, et la mutilation génitale féminine. Les femmes sont également sous-représentées dans les positions de pouvoir et de prise de décision, tant dans le secteur public que privé.
Il est donc important de continuer à travailler à l'autonomisation des femmes tchadiennes, en particulier en renforçant les lois et les politiques visant à protéger leurs droits et en garantissant leur participation pleine et égale à tous les aspects de la vie sociale, économique et politique du pays.
III. ÉTAT DES LIEUX DU RÔLE DE LA FEMME DANS LA SOCIÉTÉ TCHADIENNE DE NOS JOURS
Ici, nous ferons un état des lieux dans les domaines de l’éducation, de la vie professionnelle, de la vie politique et de la familiale.
3.1. Éducation
Le Tchad a réalisé des progrès significatifs dans l'éducation des filles ces dernières années, mais les femmes continuent de faire face à des obstacles dans leur accès à l'éducation et dans leur participation à la vie économique et politique de la société.
Le taux de scolarisation des filles est encore inférieur à celui des garçons, en particulier dans les zones rurales et les régions touchées par le conflit. Selon les données de l'UNICEF, le taux de scolarisation des filles au primaire était de 52% en 2018, contre 64% pour les garçons. Au niveau du secondaire, seulement 14% des filles étaient scolarisées en 2018, contre 24% pour les garçons.
Les mariages précoces et forcés sont également courants au Tchad, ce qui peut entraver l'accès des filles à l'éducation. Selon les données de l'UNICEF, près d'une fille sur trois est mariée avant l'âge de 18 ans au Tchad.
En ce qui concerne la participation des femmes à la vie économique et politique, les femmes sont sous-représentées dans les postes de direction et les postes politiques de haut niveau. Les femmes sont également confrontées à des obstacles dans l'accès aux financements et aux ressources nécessaires pour créer et gérer des entreprises.
Cependant, il y a eu des initiatives pour promouvoir l'éducation et l'autonomisation des femmes au Tchad. Le gouvernement tchadien a lancé des programmes pour encourager la scolarisation des filles et la participation des femmes à la vie économique et politique. Des organisations non gouvernementales et des partenaires internationaux travaillent également pour améliorer l'accès des femmes à l'éducation et pour promouvoir leur autonomisation économique.
3.2. Vie professionnelle
Le Tchad est un pays où les femmes ont traditionnellement occupé des rôles subalternes dans la société. Malgré cela, des progrès ont été réalisés ces dernières années pour améliorer la situation des femmes dans la vie professionnelle.
Cependant, les femmes tchadiennes continuent de faire face à de nombreux défis dans leur vie professionnelle, notamment en termes d'accès à l'éducation et à la formation professionnelle, de discrimination en matière d'emploi et de salaire, de harcèlement sexuel et de violence en milieu de travail, ainsi que de manque de soutien pour la conciliation entre vie professionnelle et vie familiale.
Le gouvernement tchadien a adopté plusieurs lois et politiques pour promouvoir l'égalité des sexes et l'autonomisation des femmes dans la vie professionnelle, notamment en offrant des programmes de formation professionnelle et en encourageant la participation des femmes aux postes de décision. Cependant, le chemin vers l'égalité des sexes dans la vie professionnelle reste long et difficile.
Bien que des progrès aient été réalisés ces dernières années pour améliorer la situation des femmes dans la vie professionnelle au Tchad, les femmes continuent de faire face à de nombreux défis et l'égalité des sexes dans ce domaine reste un défi majeur à relever.
3.3. Vie politique
Le Tchad est un pays où la participation des femmes dans la vie politique et sociale est relativement faible. Bien que la Constitution tchadienne garantisse l'égalité des sexes et interdise toute discrimination fondée sur le genre, les femmes sont sous-représentées dans les sphères politiques et décisionnelles.
En ce qui concerne la représentation politique, les femmes ne représentent qu'une faible proportion des élus, tant au niveau local que national. Le gouvernement tchadien compte également peu de femmes, avec seulement quelques-unes occupant des postes ministériels.
En dehors de la sphère politique, les femmes tchadiennes sont également confrontées à de nombreux défis en termes d'accès à l'éducation, à la santé et à l'emploi. Les femmes sont souvent confrontées à des normes sociales et culturelles qui limitent leur participation à la vie publique et les confinent dans des rôles traditionnellement définis.
Cependant, malgré ces défis, il y a des signes de progrès. Des organisations de femmes ont été créées pour lutter contre la discrimination et promouvoir les droits des femmes. Les femmes tchadiennes ont également participé à des mouvements de protestation pour demander des changements politiques et sociaux.
Le rôle des femmes dans la société tchadienne reste donc un enjeu important à aborder pour garantir une participation équitable dans les sphères politiques et sociales, ainsi que pour promouvoir l'égalité des sexes dans l'ensemble du pays.
3.4. Vie familiale
Le rôle de la femme dans la société tchadienne a connu une évolution significative au fil des années, mais il reste encore des défis à relever pour parvenir à l'égalité des sexes.
Dans les zones rurales, les femmes ont traditionnellement des rôles bien définis liés aux tâches ménagères, à l'agriculture et à l'élevage. Cependant, de plus en plus de femmes tchadiennes accèdent à l'éducation et à des emplois rémunérés, ce qui leur permet de participer davantage à la vie économique et politique du pays.
Malgré cela, les femmes sont encore confrontées à des obstacles importants, notamment en termes d'accès à l'éducation, de santé, d'emploi, d'autonomisation économique et de participation à la vie politique. Les taux d'analphabétisme chez les femmes restent élevés, en particulier dans les zones rurales, et les mariages précoces et les mutilations génitales féminines sont encore courants.
Le gouvernement tchadien a pris des mesures pour améliorer la situation des femmes, notamment en adoptant des lois pour protéger les droits des femmes et en mettant en place des politiques pour encourager leur participation à la vie économique et politique du pays. Cependant, il reste encore beaucoup à faire pour parvenir à une véritable égalité entre les sexes dans la société tchadienne.
IV. LES DÉFIS À RELEVER POUR L'ÉPANOUISSEMENT DE LA FEMME TCHADIENNE
Les défis à relever doivent être orientés vers la lutte contre les violences faites aux femmes, à la promotion de l’éducation des filles, à l’accès de la femme à l’emploi et à la représentation au niveau politique.
4.1. Lutte contre les violences faites aux femmes
La lutte contre les violences faites aux femmes est un défi crucial à relever pour l'épanouissement de la femme tchadienne. Les violences faites aux femmes sont un problème mondial, mais elles sont particulièrement préoccupantes au Tchad où les femmes font face à de multiples formes de violence, y compris la violence domestique, les mariages forcés, les mutilations génitales féminines, le harcèlement sexuel et le viol.
Ces formes de violence ont des conséquences dévastatrices pour les femmes tchadiennes, notamment une augmentation du risque de problèmes de santé mentale et physique, une réduction de l'accès à l'éducation et à l'emploi, ainsi qu'une diminution de la participation des femmes à la vie publique et politique.
Pour lutter contre ces violences, il est nécessaire de mener des actions concrètes telles que l'adoption et la mise en œuvre de lois pour protéger les femmes contre les violences, la sensibilisation du public sur les droits des femmes, la mise en place de mesures de protection et de soutien pour les victimes de violences et la promotion de l'égalité des sexes.
En travaillant ensemble pour éradiquer les violences faites aux femmes, les femmes tchadiennes peuvent accéder à de meilleures opportunités pour leur épanouissement personnel et contribuer pleinement au développement de leur pays.
4.2. Promotion de l'éducation des filles
La promotion de l'éducation des filles est un défi important à relever pour l'épanouissement de la femme tchadienne pour plusieurs raisons :
  • L'accès limité à l'éducation
En raison de facteurs tels que la pauvreté, les normes culturelles et les conflits armés, de nombreuses filles tchadiennes ont un accès limité à l'éducation. Cela les empêche d'acquérir les compétences et les connaissances nécessaires pour améliorer leur vie et celle de leur communauté.
  • L'autonomisation économique
L'éducation des filles est un investissement essentiel pour leur autonomisation économique. Les femmes éduquées ont plus de chances de trouver un emploi bien rémunéré et de devenir financièrement indépendantes, ce qui leur donne davantage de contrôle sur leur vie et leur permet de prendre des décisions importantes concernant leur propre avenir.
  • La santé
Les filles éduquées ont tendance à être en meilleure santé que celles qui n'ont pas accès à l'éducation. Elles sont mieux informées sur les questions de santé et sont plus susceptibles de prendre des décisions éclairées concernant leur propre santé et celle de leur famille.
  • Les droits de l'homme et l'égalité des sexes
L'éducation des filles est également importante pour la promotion des droits de l'homme et l'égalité des sexes. Les filles éduquées sont mieux à même de défendre leurs droits et de lutter contre les normes et les pratiques culturelles discriminatoires.
 
La promotion de l'éducation des filles est donc un défi à relever pour l'épanouissement de la femme tchadienne, car cela leur permettra de s'émanciper et de jouer un rôle plus actif dans la société en tant que membres productifs et autonomes de leur communauté.
4.3. Accès à l'emploi et à la représentation politique
L'accès à l'emploi et à la représentation politique est un défi important à relever pour l'épanouissement de la femme tchadienne. Malgré les progrès réalisés ces dernières années, les femmes tchadiennes font toujours face à des obstacles dans ces domaines.
En ce qui concerne l'emploi, les femmes tchadiennes sont souvent confrontées à des discriminations liées à leur genre, telles que des salaires inférieurs à ceux des hommes pour des emplois similaires, des promotions moins fréquentes, des conditions de travail plus précaires, etc. De plus, les femmes sont souvent cantonnées à des emplois considérés comme "féminins", tels que l'enseignement, les soins de santé ou les services domestiques, avec peu de possibilités d'avancement ou de diversification de carrière. Tout cela limite les opportunités d'emploi pour les femmes tchadiennes et nuit à leur épanouissement économique et social.
En ce qui concerne la représentation politique, les femmes sont également sous-représentées dans les instances politiques du Tchad. Bien qu'il y ait eu des progrès dans ce domaine, notamment avec l'adoption de quotas pour les femmes dans les élections législatives, les femmes restent largement exclues des postes de pouvoir et de décision. Cela limite leur capacité à influencer les politiques publiques et à faire entendre leur voix dans les débats politiques, ce qui a des répercussions sur leur capacité à défendre leurs droits et à participer pleinement à la vie politique du pays.
L'accès à l'emploi et à la représentation politique est donc un défi important à relever pour l'épanouissement de la femme tchadienne. Cela nécessite des efforts concertés pour surmonter les obstacles liés au genre et pour promouvoir l'égalité des sexes dans tous les domaines de la société.
4.4. Évolution des mentalités
L'évolution des mentalités est un défi important pour l'épanouissement de la femme tchadienne car la société tchadienne est encore très patriarcale. Les femmes sont souvent considérées comme inférieures aux hommes et sont confrontées à de nombreux obstacles et discriminations dans leur vie quotidienne.
Les mentalités traditionnelles considèrent souvent que la place de la femme est à la maison, où elle doit s'occuper des enfants et des tâches domestiques. Les femmes ont moins d'accès à l'éducation et à l'emploi que les hommes, ce qui limite leurs opportunités de développement personnel et professionnel.
 
De plus, les violences faites aux femmes sont encore très présentes dans la société tchadienne, notamment les violences conjugales, les mariages forcés, les mutilations génitales féminines et les violences sexuelles.
Pour que les femmes tchadiennes puissent s'épanouir et avoir les mêmes opportunités que les hommes, il est donc nécessaire de changer les mentalités et de promouvoir l'égalité entre les sexes. Cela passe par l'éducation, la sensibilisation et la mise en place de politiques publiques qui favorisent l'égalité des genres et la protection des droits des femmes.
V. CONCLUSION
5.1. Bilan de l'état des lieux
Le rôle de la femme dans la société tchadienne a évolué au fil du temps, mais il reste encore beaucoup à faire pour garantir une égalité complète entre les sexes. Les femmes tchadiennes sont confrontées à de nombreux défis, notamment l'accès à l'éducation, à l'emploi et aux soins de santé. Malgré cela, les femmes tchadiennes ont réalisé des progrès significatifs au cours des dernières décennies.
Un nombre croissant de femmes tchadiennes occupent des postes de direction dans les domaines de la politique, de l'éducation et des affaires. Les femmes sont également de plus en plus impliquées dans la prise de décision au niveau local et national. De plus, de nombreuses organisations de la société civile travaillent à autonomiser les femmes et à promouvoir leurs droits.
Cependant, les femmes tchadiennes continuent de faire face à des défis importants, tels que la violence basée sur le genre, la discrimination et les inégalités économiques. Les filles sont souvent désavantagées par rapport aux garçons en ce qui concerne l'éducation, ce qui limite leurs perspectives d'emploi et leur capacité à contribuer pleinement à la société.
Bien que des progrès aient été réalisés, il reste encore beaucoup à faire pour garantir une égalité complète entre les sexes au Tchad. Les efforts doivent se poursuivre pour autonomiser les femmes, promouvoir leurs droits et leur accès à l'éducation, à l'emploi et aux soins de santé, et lutter contre la violence basée sur le genre et la discrimination.
5.2. Perspectives pour l'avenir
Le rôle des femmes dans la société tchadienne est complexe et varie selon les régions et les groupes ethniques. Dans l'ensemble, les femmes tchadiennes ont traditionnellement joué un rôle important dans la vie économique, sociale et culturelle de leurs communautés, en tant que gardiennes de la famille, éducatrices et productrices alimentaires.
Cependant, les femmes tchadiennes sont souvent confrontées à des obstacles importants, tels que l'analphabétisme, la pauvreté, la violence domestique et les mutilations génitales féminines. Ces obstacles limitent leur accès à l'éducation, à la santé, à l'emploi et à la participation politique, et entravent leur capacité à réaliser leur plein potentiel.
Malgré ces défis, il y a des raisons d'espérer pour l'avenir du rôle des femmes dans la société tchadienne. Les efforts déployés par les gouvernements, les organisations internationales et la société civile pour promouvoir l'égalité des sexes et l'autonomisation des femmes ont commencé à porter leurs fruits, avec des progrès notables dans des domaines tels que l'alphabétisation des femmes, la participation politique et la lutte contre les mutilations génitales féminines.
En fin de compte, les perspectives du rôle des femmes dans la société tchadienne dépendront de la mesure dans laquelle ces efforts continueront à être soutenus et renforcés, ainsi que de la capacité des femmes elles-mêmes à surmonter les obstacles qui se dressent sur leur chemin.
BIBLIOGRAPHIE SELECTIVE
  1. Alifa Ngang, "La place de la femme tchadienne dans la société : étude de cas dans la ville de N'Djaména", Mémoire de maîtrise en sociologie, Université de N'Djaména, 2014.
  2. Amira Ali, "La condition de la femme tchadienne", Mémoire de maîtrise en droit, Université de N'Djaména, 2012.
  3. Béatrice Ngono, "La participation de la femme à la vie politique au Tchad", Mémoire de maîtrise en science politique, Université de N'Djaména, 2016.
  4. Fatimé Kebir, "Le rôle de la femme tchadienne dans le développement économique et social : cas de la ville de Moundou", Mémoire de maîtrise en économie, Université de N'Djaména, 2013.
  5. Hindou Oumarou Ibrahim, "La femme peule au Tchad : entre tradition et modernité", in Femmes et développement en Afrique, sous la direction de Fatou Sow, L'Harmattan, 2008.
  6. Marie-Aline Ngaro, "La place de la femme dans la société tchadienne : état des lieux et perspectives", Mémoire de maîtrise en sociologie, Université de N'Djaména, 2015.
  7. Mounira Mahamat, "Les droits de la femme tchadienne : état des lieux et perspectives", Mémoire de maîtrise en droit, Université de N'Djaména, 2014.
  8. Yveline Ndjenngar, "Le rôle de la femme tchadienne dans la lutte contre la pauvreté", Mémoire de maîtrise en économie, Université de N'Djaména, 2011.
 
 
 
 

 
Thème : La femme peut-elle efficacement prévenir les conflits et jouer un rôle pivot dans les recherches de pistes de solutions ?
Par Madjissembaye Nako, politologue
Cela fera 17 ans cet automne que la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité des Nations Unies sur les femmes, la paix et la sécurité a été adoptée. Comme la Convention de 1979 sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, elle comprend des dispositions spécifiques relatives aux négociations et aux accords de paix. Si des progrès ont été réalisés en matière d’accès et de participation des femmes aux processus de paix, beaucoup reste encore à faire. Malheureusement, les femmes continuent d’être largement exclues des processus de paix et de médiation. En conséquence, les questions d’égalité des sexes sont absentes des nouveaux accords de paix. Et ce, malgré le rôle important que les femmes jouent dans la promotion de la paix, l’instauration d’un dialogue pacifique et la recherche de solutions pour mettre fin aux hostilités dans de nombreux conflits armés. Une étude réalisée en 2012 par ONU-Femmes sur 31 processus de paix ayant eu lieu entre 1992 et 2011 illustre parfaitement la marginalisation des femmes dans ce domaine : seulement 4 % des signataires, 2,4 % des médiateurs en chef, 3,7 % des témoins et 9 % des négociateurs étaient des femmes. Comment les acteurs et les réseaux régionaux externes peuvent-ils contribuer à lutter contre la marginalisation des femmes dans les processus de paix et même contre leur exclusion de ceux-ci. Instaurer un cessez-le-feu entre les parties en conflit est une étape essentielle. Toutefois, tout aussi important, l’élaboration et la définition de nouvelles structures politiques et de nouvelles institutions de gouvernance et même, dans certains cas, la création d’une nouvelle constitution ou de nouvelles dispositions, font partie des processus de paix. Lorsqu’ils aboutissent, ce sont des moments décisifs dans l’histoire et la trajectoire d’un pays auxquels les femmes devraient participer. C’est également une occasion unique pour promouvoir les engagements du pays vis-à-vis de l’égalité des sexes en mettant en œuvre les dispositions de la Convention de 1979 sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes et en intégrant ces objectifs stratégiques dans les accords, les institutions, les mécanismes et les processus. Inspiré en partie par une initiative sud-africaine (le Gertrude Shope Annual Dialogue Forum), un réseau nordique régional de femmes médiatrices (NWM) a été créé à Oslo, en Norvège, en novembre 2015 et, depuis, cinq réseaux nationaux ont vu le jour dans les autres pays nordiques. Ce réseau a été créé pour améliorer la participation et l’accès limités des femmes aux processus de paix en renforçant et en soutenant leur participation aux négociations de paix à tous les niveaux et à toutes les étapes: en faisant mieux entendre leur voix et leurs préoccupations, en plaidant en faveur de processus plus participatifs, en entreprenant des projets conjoints, en échangeant des expériences, en constituant des réseaux et en établissant des relations avec d’autres réseaux de femmes médiatrices. La reconnaissance et la promotion de la pleine participation aux processus de paix sont donc une partie essentielle de la mise en œuvre de cette tâche et de notre engagement. D’autres réseaux régionaux ont été mis en place et peuvent être un outil efficace dans les différentes crises et zones de conflit. Première femme à être promue au grade de commandant de la Force des Nations Unies chargée du maintien de la paix à Chypre (UNFICYP), le général de division Kristin Lund a participé au processus de paix en cours, l’a soutenu et l’a encouragé. L’équipe dirigeante de la Force femmes comptait 50 % de femmes. L’égalité des sexes figurait sur la liste des priorités à l’intérieur et à l’extérieur et n’était jamais le dernier point. Cette question a été intégrée dans tous les aspects de notre travail. De plus, en tant que chef de l’équipe de l’ONU, il nous incombe de soutenir la diversité et d’agir conformément à la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité. Dans l’UNFICYP, la tâche a été aisée. Le fait que des femmes aient été à la tête des opérations a permis d’ouvrir de nombreuses portes dans la communauté. Offrir une aide aux différentes couches de la société peut jouer un rôle important dans un processus de paix. En mai 2016, le réseau NWM (Norvège) a été invité à Chypre afin de rencontrer les organisations de femmes, l’équipe consultative sur l’égalité des sexes, le Comité technique sur l’égalité des sexes, le Représentant spécial du Secrétaire général et le Conseiller spécial du Secrétaire général. Le NWM (Norvège) a acquis une expérience considérable dans les processus de paix au Moyen Orient, en Colombie et aux Philippines. De nombreuses expériences ont été communiquées et échangées. Il est apparu clairement que la promotion de l’égalité des sexes devait venir d’une approche participative plutôt que d’une approche du sommet vers le bas, la première approche étant essentielle à l’établissement d’une paix durable. Les données empiriques montrent que les accords de négociations ont plus de chances d’aboutir et la paix plus susceptible d’être établie lorsque les processus de paix sont ouverts.
  • DONNER LE POUVOIR AUX FEMMES LORS DE CRISES ET DE CONFLITS
Il est essentiel de donner le pouvoir aux femmes lors de crises et de conflits. Représentant 50 % de la population mondiale, elles doivent être un élément de la solution. Dans les situations de conflit armé et de crise, il est nécessaire d’avoir des contacts directs avec des femmes et des organisations de femmes. Dans aucun pays, les femmes représentent un groupe homogène. Il est donc important de prendre en compte les identités ethniques, religieuses, linguistiques et autres. On ne peut pas s’attendre à ce que toutes partagent les mêmes opinions. Par exemple, les points de vue, les préoccupations et les besoins des travailleuses vivant en milieu urbain seront probablement différents de ceux des agricultrices et des micro-entrepreneurs des zones rurales. Il faut prendre les femmes au sérieux. De chaque côté du conflit, elles auront des points de vue, des perspectives, des besoins et des préoccupations différents, mais pas plus que les hommes. Dans de nombreux pays touchés par un conflit, les femmes mènent des initiatives de paix au niveau local, pas nécessairement dans la capitale, mais dans les zones touchées. Il est essentiel de les consulter et de soutenir les efforts qu’elles mènent pour mettre fin aux hostilités et de promouvoir le dia- logue et la compréhension. C’est aussi une obligation liée à la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité. Dans les régions où il n’y a pas d’organisations de femmes et de la société civile, il est essentiel d’établir un contact direct avec les femmes et, lorsque c’est possible, un mécanisme de consultation avec les pairs et les partenaires. Bien entendu, il faut prendre en compte la structure politique afin de ne pas créer une nouvelle situation qui leur serait inconfortable. Pendant les périodes de conflit et de crise, les efforts entrepris aux niveaux local, national, régional et international visent à stopper la violence, à la réduire et à amener les parties en conflit à des négociations préliminaires afin de voir si des pourparlers de paix officiels sont possibles entre ces acteurs avec, souvent, l’accord d’un cessez-le feu temporaire. Lorsque les négociations aboutissent, une feuille de route est élaborée pour des négociations de paix et un règlement officiel du conflit. Les femmes et les acteurs de la société civile sont souvent exclus des pourparlers préliminaires et des accords qui se font souvent dans la confidentialité. Ils ne peuvent donc pas exprimer leurs besoins et leurs préoccupations pendant ces négociations lorsque des pourparlers officiels sont lancés pour examiner les causes du conflit. La plupart des processus de paix visent à mettre fin à la violence ou la violence politique mais ne reconnaissent pas les différentes formes de violence subies par les femmes et les minorités, comme les populations autochtones, laissant la situation inchangée et ne prenant pas en compte les préoccupations de la moitié de la population en matière de sécurité. Comme tels, les pourparlers en vue de négociations et les accords présentent un défi majeur pour les femmes et la société civile, car ils créent les conditions et la structure des pourparlers officiels. Il est aussi possible d’engager un dialogue avec les femmes et les acteurs de la société civile, mais cela dépend beaucoup de la situation sécuritaire dans le pays. Une fois que les pourparlers officiels se précisent, il est essentiel de travailler avec les femmes, les organisations de femmes et la société civile pour les aider à préparer leur participation aux processus de paix, directement à la table des négociations officielles ou dans des voies, des structures et des processus parallèles. Très peu d’acteurs de la société civile peuvent simplement se présenter et participer à ces processus. Beaucoup ont besoin d’être aidés, guidés et soutenus s’ils veulent vraiment participer de façon efficace, c’est-à-dire en leur offrant une aide technique et financière, mais aussi en leur donnant les moyens de consulter leurs représentants et d ’élaborer des stratégies sur les points à négocier concernant des questions spécifiques.
II- LE RÔLE DES FEMMES DANS LES PROCESSUS DE RESOLUTION DES CONFLITS
Les femmes jouent de nombreux rôles dans les processus de paix complexes et à voies multiples. Elles peuvent être invitées à la table des négociations officielles, siéger dans un comité technique ou une sous-commission ou ne pas prendre part aux pourparlers et travailler avec la société civile pour suivre les événements. Tous ces rôles sont essentiels. Dans les processus récents engagés entre le Gouvernement colombien et les Fuerzas Armadas Revolucionarias de Colombia-Ejército del Pueblo (FARC), les femmes actives au sein de la société civile ont joué un rôle crucial en encourageant leur mobilisation au niveau national et en formulant leurs demandes et leurs préoccupations. Ces voies imperturbables ont joué un rôle important en faisant inclure dans les accords finaux un certain nombre de dispositions en faveur des femmes. Les femmes compétentes et les représentantes de la société civile jouent aussi un rôle important, veillant à ce que les préoccupations, les perspectives et les besoins des femmes soient inclus dans les nouvelles constitutions, les dispositions juridiques, les institutions et les nouveaux mécanismes ainsi que dans les processus de réforme des tribunaux, des services de police, du secteur de la sécurité et d’autres institutions gouvernementales. Les dispositions juridiques sont essentielles comme le sont les mécanismes de mise en œuvre. Il y a, dans toutes ces réformes, une possibilité unique d’intégrer les objectifs stratégiques en matière d’égalité des sexes et de droits de l’homme et de s’attaquer aux racines structurelles des inégalités. On a tendance à limiter les questions qui intéressent les femmes à certains domaines, en général la santé, l’éducation et, parfois, les services de protection sociale. Il est essentiel de sortir de ces schémas de pensée afin que les réformes de la police, du secteur de la sécurité et des tribunaux soient considérées aussi essentielles pour les femmes que pour les hommes. Par exemple, la violence à l’égard des femmes demeure un phénomène mondial et est une source majeure d’insécurité pour les femmes et les filles, que ce soit dans la sphère privée ou dans la sphère publique. Il faut que les femmes participent à la réforme des services de police et des tribunaux si nous voulons que leurs besoins puissent être intégrés dans le travail de ces institutions. Pour que les femmes et les acteurs de la société civile puissent participer à ces processus et assurer une vaste participation, des mécanismes doivent être mis en place pour intégrer des processus de consultation sectorielle. Le rôle des médiateurs dans la communication avec les populations locales est tout aussi important pendant les pourparlers de paix officiels. En fait, les médiateurs et les facilitateurs ont une plus grande responsabilité après qu’un processus de paix a été établi. Pour ce faire, ils doivent élaborer un plan d’action et un protocole pour assurer la participation des femmes. Nous devons aider les groupes de femmes à exprimer leurs préoccupations et leurs demandes et à les formuler, comme dans le cadre du processus de paix avec les FARC en Colombie qui a suscité la mobilisation nationale des femmes. Il est aussi important de créer des mécanismes qui permettent à ces groupes d’accéder aux négociations officielles. Les acteurs extérieurs jouent un rôle crucial pour s’assurer que ces organisations de femmes et ces mécanismes disposent de ressources suffisantes pour pouvoir participer. Ces acteurs et les facilitateurs sont aussi importants pour veiller à ce que les pourparlers créent un cadre qui permet aux femmes d’exprimer leurs préoccupations. L’autonomisation des femmes dans les situations de crise et de conflit doit être l’un des outils les plus importants dans un processus de paix. Faire appel à des médiatrices compétentes ou à des réseaux établis peut être un bon point de départ pour que les dirigeants se rendent compte combien il est important d’inclure l’ensemble de la population. Christine Bell explique très bien pourquoi l’exclusion des femmes des processus de paix est problématique : « L’exclusion des femmes les empêche de participer aux processus qui sont essentiellement des processus de prise de décision qui, à la fois, préparent la voie pour sortir des conflits et mettent en place les structures gouvernementales politiques, juridiques et économiques; fournissent un plan pour la reconstruction après un conflit; déterminent le rôle des organisations internationales; et mettent en place des flux de financement. »
Notes 1 Christine Bell, « Women and peace processes, negotiations, and agreements: operational opportunities and challenges », note de synthèse (Oslo, Norwegian Peacebuilding Resource Centre, 2013), pp. 2-3. Disponible sur le site https://noref.no/Publications/Themes/Peace-processes-andmediation/Women-and-peace-processes-negotiations-and-agreements-operational-opportunitiesand-challenges. 2 Entité des Nations Unies pour l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes, « Women’s Participation in Peace Negotiations: Connections between Presence and Influence », document de recherche (New York, 2012), pp. 1-3, 5. 3 H. Hilde Salvesen et Dag Nylander, « Towards an inclusive peace: women and the gender approach in the Colombian peace process », rapport (Oslo, Norwegian Centre for Conflict Resolution, 2017). Disponible sur le site https://noref.no/About-NOREF/News/New-reportwomen-and-the-gender-approach-in-the-Colombian-peace-process 4 Bell, “Women and peace processes, negotiations, and agreements”, p. 4
 
 
 
 
 

 
L’ENGAGEMENT DE LA FEMME TCHADIENNE dans la prevention et la resolution des conflits
 Achat Djibrine, ancienne ministre de la culture, présidente des femmes médiatrices.
INTRODUCTION
Le Tchad a connu pendant plus de six décennies, des tensions sociopolitiques entretenues par la multiplication de groupes politico-militaires. L’instabilité des pays voisins (La Libye, le Darfour et la RCA) ainsi que le développement du phénomène du terrorisme et de l’extrémisme violent autour du bassin du Lac Tchad et dans le Sahel constituent des menaces supplémentaires à la stabilité du Tchad.
En 2021, le lancement du dernier processus électoral présidentiel au Tchad a suscité beaucoup de perturbations dans le paysage socioéconomique et politique : des divergences de points de vue des acteurs politiques ont mis à mal, la paix et la cohésion sociale.
Les associations de femmes Tchadiennes, longtemps confinées dans la ligne de lutte pour leurs droits intègrent également quelques- unes qui ont pour ligne d’action : la paix et la contribution des femmes dans les mécanismes de gestion et de résolution des conflits. Imbriquées et incrustées dans ce grand cadre qui comporte toutes les thématiques et incarné par la CELIAF (Cellule de Liaison des Associations Féminines), l’impact de leurs actions spécifiques tarde à se faire voir. C’est pourquoi, elles ont résolu de passer à l’étape de mise en œuvre de la citoyenneté et ce, en mettant en place une coalition pour assurer la médiation entre les différents acteurs en conflits, surtout sociopolitiques.
La Recherche, le Maintien et la Consolidation de la Paix dans un pays est un devoir citoyen qui interpelle tout individu se reconnaissant membre d’une communauté : les femmes ne sont pas du reste.
Cette communication qui s’articule autour de trois points, vise à montrer les efforts des femmes tchadiennes en matière de Paix, de Sécurité, de Gestion et de Prévention des conflits de tous ordres au Tchad.
 Ainsi, nous aborderons tour à tour :
  1. Le Contexte des conflits- Historique et Fondements de l’engagement des Femmes Tchadiennes dans la prévention et la résolution des conflits.
  2. Les Principales actions menées - Forces et Faiblesses du mécanisme de médiation qu’est la CFTMPD.
  3.  Le « Youyou» des femmes: un rite culturel à développer comme outil de prévention et de gestion des conflits avant leur résolution.
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  1. CONTEXTE-FONDEMENTS ET HISTORIQUE DE L’ENGAGEMENT DES FEMMES TCHADIENNES DANS LA PREVENTION ET LA RESOLUTION DES CONFLITS.
I.1 Le contexte des conflits au Tchad
Depuis son accession à l’indépendance jusqu’à nos jours, le Tchad est constamment en conflit.
I.1.1 Contexte historique des conflits.
La souveraineté internationale du Tchad a été proclamée et mise sous le vocable : République qui marque la fin des pouvoirs personnels, mystiques, héréditaires et arbitraires. Sur l’espace de cette République cohabitent une mosaïque de peuples vivant une diversité culturelle étonnante. Par conséquent, la construction d’un socle  national était une priorité pour les premiers dirigeants politiques du pays.[[1]]url:#_ftn1 S’en suivront donc des régimes de gestion représentative et démocratique.
Le Président François Tombalbaye chercha à réaliser l’État-Nation à travers l’instauration du monopartisme. Il créa dès le 19 Janvier 1962, le Parti Progressiste Tchadien (P.P.T.)  La conséquence de cette démarche politique en est les abus administratifs et la faillite politique ayant entraîné les guerres civiles que nous connaissons jusqu’à nos jours.
Dès Novembre 1978, des désaccords apparurent sur la nomination de fonctionnaires civils à des postes d’autorité et sur l’intégration des Forces Armées du Nord (FAN) dans l’Armée Nationale Tchadienne (ANT) et explosèrent le 12 février 1979 à N’Djamena.
Depuis lors, tous les gouvernements (Félix Malloum, Goukouni Weddeye, Hissein Habré,  Idriss Déby Itno)  qui se sont succédés n’ont fait qu’exacerber les clivages politiques et identitaires au sein de la communauté tchadienne.
I.1.2 Le contexte de conflit sur la période 2018 – Mars 2021
Le contexte qui a déclenché la mise en coalition des organisations de femmes est le climat sociopolitique qui prévalait depuis 2018. Au moins, sept (7) points recensés ont constitué les éléments déclencheurs du conflit pré -électoral en début d’année 2021.
  • Les revendications politiques pour des élections transparentes et l’alternance ;
  • Les revendications socio-économiques des syndicats et jeunes diplômés sans emplois pour une meilleure gouvernance économique : respect des droits sociaux des travailleurs et accès égalitaire à l’emploi ;
  • La création massive des organisations de la société civile partisane ;
  • L’alliance des partis politiques et groupes des OSC pour manifester régulièrement ;
  • Les mesures de contrôle et de répression des contestations ;
  • L’organisation par le gouvernement de 2 forums sur les réformes institutionnelles (suppression de la Primature et d’autres institutions) dont le second, en 2020 a consacré la 4e République ;
  • Les attaques pressantes de groupes politico-militaires.
Dans ce contexte, les femmes ont posé deux actes :
  1. Deux communiqués de presse en date du 05 février et du 13 mars 2021 à l’issue de l’Assemblée Générale Nationale Ordinaire tenue à N’Djamena sous le thème : « Femme tchadienne, démocratie, État de droit et Paix durable » qui a réuni des participantes des dix-sept provinces du pays pour appeler les acteurs sociopolitiques à une gestion apaisée du processus électoral ; 
  2. Une correspondance adressée le 22 Mars 2021 au Maréchal du Tchad, proposant leurs bons offices pour la médiation entre les acteurs sociopolitiques en conflit.
Mais aucun acteur sociopolitique n’a accordé une oreille attentive à ces appels.
I.2.Historique de l’engagement et participation des femmes
  1. La participation des femmes dans les mécanismes de gestion et résolution des conflits
Depuis les années 1990, les femmes tchadiennes à travers la structuration de leurs organisations spécifiques :  Cellule de Liaison et d’Information des Associations Féminines, CELIAF, Union des Femmes pour la Paix, UFEP ; Fédération des Femmes pour la Paix Mondiale au Tchad, FFPMT, Association des Femmes Unies pour la Paix au Tchad, AFUPT, Association des Femmes pour la Paix et la Sensibilisation au Tchad, AFPST etc , ont participé à la recherche de la paix notamment dans les domaines des conflits sociaux (sensibilisation, écoute dans les cas de VBG de la sphère privée, publique) et conflits politiques  (différents processus/mécanismes ou cadres de négociation). 
Déjà en Septembre 2014, la CELIAF avait organisé un atelier sous- régional qui a regroupé les Femmes de l’Afrique Centrale et de l’Ouest. L’objectif était d’initier un plaidoyer pour la représentativité des femmes au sein des mécanismes de gestion et de résolution des conflits dans l’espace national, régional, sous- régional et international à savoir UA, CEAC, CEMAC, ONU. Cette initiative louable n’a malheureusement pas reçu un bon coach et s’est estompée.[[2]]url:#_ftn2
L’on peut noter que dans les processus ou mécanismes de recherche de paix tels que : Les Accords de Kano 1 et 2 ; Khartoum 1 et 2; Abuja; Tripoli ; Brazzaville et  Franceville etc…les délégations de négociateurs étaient fortement masculine tandis que la représentation des femmes était  piètre présence. A  à France Ville comme à Doha,  des femmes se sont débattues à la dernière minute pour se mettre dans les délégations parties du Tchad.
Cependant, si la Conférence Nationale Souveraine pouvait être considérée comme un mécanisme de paix, alors, à ce niveau, l’on peut noter une présence significative des femmes aux assises de N’Djamena en 1993.[[3]]url:#_ftn3
Voici les mécanismes récents qui ont pris en compte quelques femmes :
  • CODNI :  19,71%,
  • Comité Technique Spécialisé : 7,14%,
  • DOHA : 1 femme sur la trentaine des membres de la délégation.,
  • CNDP :  1 femme sur 30
  • Forum 2018 et 2020 ( cf rapport  )
  • DNIS. : 266 femmes sur 1646 participants soit 17%.
  1. La mobilisation des femmes et naissance de la Coalition des Médiatrices.
Récemment, les femmes ont pris conscience des risques probables et imminents d’un conflit post électoral, considérant les expériences vécues par certaines lors de l’éclatement de la guerre civile de 1979, mais aussi, l’exemple des conflits post-électoraux dans d’autres pays voisins. Dans un élan patriotique, les femmes de treize organisations féminines ont donc mis en place une coalition dénommée « la Coalition des Femmes Tchadiennes Médiatrices pour la Paix Durable (CFTMPD).
Les structures engagées à ce jour par la charte de convention sont (cf. sigles et abréviations) : l’AFPST, l’AFUPT, la CELIAF, la Cellule féminine du CSAI, le MIFEM/A, l’OFCE, le REFAMP/T, le REFELAT, l’UAFAT, l’UFCCT, l’UFEP, l’UIFM/T, CSPSDT. Des personnalités féminines et personnes -ressources font également partie de ce mécanisme.
I.3 Fondements de l’engagement citoyen des femmes
 L’engagement citoyen est l’attitude ou l’acte par lequel un individu :
- exprime sa prise de conscience des enjeux sociaux au niveau local, national ou mondial, sa conviction pour la transformation sociale et initie ou s’implique dans des initiatives communautaires pour contribuer aux changements sociopolitiques, économiques, politiques et culturels.
C’est un acte par lequel on s’engage à réaliser quelque chose :
- engagement comme fondement ;
- engagement comme « intrusion dans un espace » ;
- engagement comme règle philosophique = assumer ses valeurs.
I.3.1 Niveau national.
L’engagement des femmes Tchadiennes est citoyen. Il découle de la prise de conscience d’une situation sociale et politique pour laquelle, les hommes et les instituions ont longtemps essayer de régler mais sans succès réel.
Il y a eu des tentatives des organisations des femmes dont l’objectif est la recherche de la paix et la résolution des conflits. Ces organisations n’ont pas d’autonomie, dépendent du soutien extérieur et n’ont pas pu produire les effets attendus.
Cet engagement des femmes en faveur de la création de la Coalition a été encouragé par le défunt Maréchal qui a accordé une réponse favorable à la proposition d’une faîtière sollicitant l’accord des plus hautes autorités pour permettre aux femmes tchadiennes d’offrir leurs bons offices dans la gestion de la crise sociopolitique, par la médiation, pour une paix durable au Tchad. Elle s’investit en œuvrant pour la cohabitation pacifique et le vivre ensemble.
Niveau régional.
La Commission de l’Union Africaine a marqué, en des documents pertinents, la place qui doit désormais revenir aux femmes en Afrique. Elle a défini des objectifs, formulé des recommandations et même exigé le suivi de celles - ci. Dans la Déclaration solennelle sur l’égalité hommes/ femmes en Afrique, les Chefs d’Etat et de Gouvernement des Etats membres de l’Union Africaine ont, après avoir réaffirmé leur  
«engagement à poursuivre, à intensifier et accélérer les efforts pour promouvoir l’égalité entre les hommes et les femmes à tous les niveaux », donné l’assurance de la « pleine participation et représentation des femmes au processus de paix, y compris la prévention, la gestion et le règlement des conflits et la reconstruction post-conflit en Afrique… ». La messe étant dite, il reste à nous  toutes et tous, d’en réenchanter l’esprit en vue de le rendre opératoire[[4]]url:#_ftn4
-Niveau international :
L’adoption de la Résolution 1325 en 2000 traduit la volonté des Nations Unies à considérer l’apport des femmes dans les questions de Paix et de sécurité. Le Tchad vient d’adopter son premier plan d’action de mise en œuvre assorti d’un budget. Cela constitue un soubassement fort de l’engagement des femmes Tchadiennes. Il est vrai que les femmes tchadiennes sont plus expérimentées dans la gestion des conflits sociaux que politiques, mais vu le risque encouru par le pays, elles se sont engagées à apporter leur modeste contribution dans la prévention et la résolution de conflits.
Quelles sont donc les actions menées par la Coalition des Médiatrices Tchadiennes jusqu’à ce jour et quelles sont ses perspectives ?
  1. PRINCIPALES ACTIONS MENEES -FORCES ET FAIBLESSES DU MECANISME
II.1 Activités
Les principales actions menées par la Coalition sur la période 2021 à 2022 :
  1. Communication
  • Points et communiqués de presse.
  • Emissions radio et télé
  • Conférences débats
  • Conception et diffusion de Messages/Appels à la Paix/ Slam/Poèmes.
     B. Plaidoyer en faveur de la Paix
  • Contribution aux initiatives de l’UA et des Nations Unies à travers la participation aux rencontres des diverses missions ;
  • Participation aux initiatives de médiation du Groupe des Religieux et Ainés pour amener les groupes opposés au Dialogue National Inclusif ;
  • Remobilisation des Religieux et des Autorités pour la reprise d’un dialogue fraternel, après les évènements du 20 Octobre 2022 ;
  • Propositions adressées aux plus Hautes Autorités pour une gestion apaisée de la transition.
  • Contribution aux processus de mise en place de la Coordination Nationale des Autorités Morales, CONAM, soutenu par IDEA.
C/ Plaidoyer en faveur de la participation des femmes aux processus formels de recherche de paix
  • Analyse du degré de sensibilité au Genre de l’Accord de DOHA ;
  • Synthèse des Actes des initiatives de paix menées par les diverses organisations féminines avec focus sur les responsabilités des acteurs impliqués dans la gestion de la Transition.
  • Contribution à la participation des femmes au dialogue national travers le Mécanisme de promotion de la participation des femmes au DNIS.
  1. Renforcement des capacités des membres et du mécanisme
  • Formation/recyclage des membres sur les techniques de médiation, négociation ;
  • Analyse du contexte sociopolitique national ;
  • Elaboration d’un plan stratégique triennal
Pour contribuer à l’apaisement des tensions sociopolitiques au début de la transition, des organisations féminines ont organisé des marche, des séminaire et symposium sur la Paix : REFELAT, CONAF, Fondation Hassan Djamous pour la Paix . Le Ministère du Genre a quant à lui organisé un symposium national sur « la contribution des femmes à la résolution des conflits et leur intégration dans les mécanismes de gestion et de résolution de ces conflits.
 
II.2 Forces et Faiblesses du mécanisme de médiation qu’est la CFTMPD
Comme tout mécanisme, celui - ci comporte des forces à développer et des faiblesses à transformer en opportunités.
2.1 Forces :
  1. Engagement citoyen des femmes/volontariat actif ;  
  2. Disponibilité de l’expertise dans la communication non violente au sein de la Coalition ;
  3. Diversité de profils des femmes issues des organisations de développement, de défense des droits humains et de type confessionnel ;
  4. Familiarisation à la 1325 et contribution de certains membres au processus d’élaboration du PAN 1325 adopté en Janvier 2023.
  5. Existence d’un cadre de formation pour la participation des femmes dans les mécanismes formels de recherche de paix ;
  6. Reconnaissance de la contribution des femmes et du rôle de la CFTMP par les autres acteurs et autorités administratives.
Ces forces constituent la somme des énergies individuelles des femmes engagées : foi, spontanéité à la contribution matérielle et financière.
Cependant, l’engagement de cette frange importante de la population n’est pas encore optimal. Les femmes tchadiennes ont encore des faiblesses à transformer en forces pour une participation effective dans la prévention et la résolution des conflits.
2.2 Faiblesses :
  1. Ignorance des exigences de la médiation par certains membres, spécifiquement le principe d’impartialité, la discrétion et la constance de l’engagement ;
  2. Indisponibilité des membres liée à la difficile combinaison de leur triple rôle : travail rémunéré, gestion des cérémonies, gestion du foyer ;
  3. Faibles capacités techniques liées au manque de temps dédié à la recherche d’informations et à la lecture ;
  4. Faible synergie d’actions des organisations des femmes œuvrant dans le même domaine due aux conflits de leadership (intra et inter organisations) et aux positionnements politiques.
III. Le « You-you » des femmes ou « zakharates » : un rite culturel à développer comme outil de prévention des conflits ?
Dans cette partie, on fera un panorama de l’utilisation de cette onomatopée dans certains pays.
Peut-on révolutionner les techniques de prévention des conflits sociaux et politiques par l’usage de cette pratique dans notre pays ?
Comment et quand faire le « YouYou » ? Qui peut faire usage de cette pratique ? Comment la Coalition des Médiatrices pourrait-elle l’implémenter dans la prévention des conflits ?
  1. Définition
Le « youyou » est ce cri long, aigu et modulé que poussent exclusivement les femmes dans des circonstances diverses, spécialement  lors des mariages,  naissances, enterrements,  festivités ou spectacles culturels.
Le « youyou » exprime généralement une émotion collective lors de rassemblements : la joie (dans les mariages et autres festivités),  mais aussi « la colère , la fureur ou le désespoir ».
 En français, les «  youyous » ont été désignés par onomatopée  :  « ouloulou », « olouloulou », « lou lou lou », ou encore « yiheyi ».
Dans de nombreuses cultures, l'utilisation dépend du contexte, car les exclamations ululées peuvent apparaître dans différentes circonstances comme un cri de lamentation ou comme un cri de guerre.
  1. Expression des « youyou
Tout d'abord, il semblerait que les « youyous » tirent leur origine de l'antiquité. En effet, ils étaient pratiqués en Libye antique et en Grèce Antique dans les temples de la déesse Athéna comme l'affirme Hérodote qui y mentionne des « cris perçants qu'on entend dans les temples de cette déesse ; on peut retenir que c'est des femmes libyennes que les youyous proviendraient. Elles en usent fort et de manière remarquable.
Pendant la guerre d'Algérie, souvent pendant l’exécution des combattants algériens par l'armée française, les Algériennes poussaient des » youyous » en signe de courage et de douleur partagée. 
  1. Quelques exemples de la pratique dans les espaces.
La pratique du « Youyou » existe spécialement chez les femmes de l’Afrique du Nord, l’Afrique du Sud du Sahara, de l’Asie Centrale et du Sud, de l’Europe du Sud et de l’Amérique.
Au Liban, lors des mariages quelques versets sont scandés avant le grand cri ; ces versets complimentent généralement les mariés, soulignant leur beauté, leurs familles et leurs bonnes manières.
En Palestine, les femmes pleuraient en poussant des youyous lorsque l’armée d’occupation israélienne démolissaient leurs habitations. Chez les Juifs, le « youyou » se produit aux occasions festives telles que l'inauguration d'un rouleau de Torah.
 En Amérique du Nord, les femmes  Amérindiennes du Nord, les Lakota, crient «  lililili ! » d'une voix aiguë pour féliciter les guerriers pour leurs actes de bravoure.
Au niveau du sous -continent Indien, le « youyou » est largement pratiqué au cours des festivités (mariages) des rituels, festivals et célébrations des temples hindous.
En Afrique subsaharienne, spécifiquement dans la Corne de l’Afrique, (Ethiopie et Erythrée), le « youyou » est exécuté par des fidèles au cours de la célébration. En Afrique de l’Ouest, le « youyou » est utilisé par les femmes comme une manifestation de joie, de deuil ou d'attention.
  1. Usage du « Youyou ».
Le « Youyou » est un couteau à double tranchant. Dans nos sociétés africaines, précisément chez nous au Tchad, il peut pousser au pire, attiser ou apaiser le conflit.
A quel signe reconnait-on le type de « youyou » ?
Chaque région comporte dans ses mœurs, la pratique des « youyou ». En modernisant cette pratique, on peut répertorier les symboles utiles pour les reconnaître. Dans nos villages, nous avons les tam-tams, les « youyous » et la cloche (pour les chrétiens catholiques) : les tam-tam annoncent différents sons selon le contexte : la chasse, la pêche le deuil, un conflit(guerre) ; La cloche pour l’église sonne de façon intermittente. Quand elle sonne vite, c’est un cas de décès.
Les tam-tams sont l’apanage des hommes alors que les « youyou » sont socialement typiques aux femmes.
Comment distingue-t-on les formes de « Youyou ? » Cela doit faire l’objet d’une étude sur toute l’étendue du territoire. Mais déjà, la Coalition peut faire l’expérience dans les dix arrondissements de la capitale qui représentent géographiquement, les différentes régions dominantes. Le processus de réflexion sera déclenché à la suite de cette expérience.
Si la résolution des conflits implique la mise en place d’une task force pour désamorcer et régler le conflit, cela induit des méthodes appropriées qu’il faut chercher et apprendre au travers des éléments de notre environnement culturel et social.
Où sont les femmes ? Dans la gestion ou dans la résolution des conflits ?
Les expertes en médiation de la CFTMPD vont ramener le complexe à l’accessible. Elles vont dérouler les plaques superposées que représentent les conflits à l’image des oignons qu’elles utilisent tous les jours, mais aussi à l’exemple des fils qu’elles utilisent dans le tricotage et la broderie des nappes : Le rouleau de pelote est enroulé pour ne laisser qu’un bout ; quand ce bout se perd, le fil risque d’être inutilisable. Il faut le retrouver pour que l’ouvrage soit achevé. Il en est de même pour les conflits ; Ils sont imbriqués, entrelacés. Il faut savoir identifier le bout pour le dénouer.
CONCLUSION ET PERSPECTIVES
 Aujourd’hui la médiation est perçue comme une activité lucrative ; pourtant elle est une mission divine. 
Qui, mieux que les Femmes qui donnent et entretiennent la vie au prix de multiples sacrifices, savent comment préserver cette vie ?  Elles ont un rôle central à jouer sur l’échiquier politique de la recherche de   la Paix et du maintien de la Sécurité surtout en cette période de transition où les énergies sont concentrées sur la refondation de l’Etat.
C’est dans l’espace familial que la Mère aimante et l’épouse attentionnée devra donner à chaque membre de la maisonnée, la paix intérieure à travers l’affection, les conseils basés sur les saintes écritures et les proverbes ou dictons qu’elle peut donner au père et aux enfants ; ainsi, le formatage ou le reformatage de l’esprit de l’enfant adolescent ou de l’adulte responsable sera alimenté par la paix dans les relations humaines entretenues dans la justice et l’égalité. Ainsi elle aura fortement contribué à la prévention des conflits sociocommunautaires qui prennent leurs sources au sein des familles. Les sociétés ont adopté des codes pour interpréter chaque situation, ils peuvent aussi trouver la formule qui va sonner l’alerte en cas de début de conflit, de son éclosion ou de sa transformation. Les « Youyou » tels que répertoriés dans tous les espaces jouent un rôle important. Leur usage obéit à un ensemble de code qui, décryptés permettront d’en faire une adaptation réussie
Les femmes ont développé au fil des temps, de l’expertise dans la résolution des conflits familiaux qui demeurent leurs zones d’influence ; elles doivent maintenant se familiariser à la complexité des conflits sociopolitiques et se faire accepter par les premiers acteurs et détenteurs de pouvoirs que sont les hommes, les initiés, les hommes en tenue qui souhaitent « sécuriser la femme » telle que la société traditionnelle le leur recommande.
 
En perspective, la Coalition des Médiatrices entend réfléchir sur la formule des « youyou », avec le concours de toutes les strates traditionnelles dans nos groupes sociaux. Le Plan d’Action National de la Résolution 1325 des Nations Unies offre une possibilité aux femmes tchadiennes de participer à la prévention et gestion des conflits. Dans cette aventure, elles sauront compter avec les principaux partenaires engagés dans la promotion de la paix et de la stabilité du Tchad.
Comment  identifier des conflictogènes en vue d’une meilleure prévention ?
Par ABDELSALAM YOUNNOUS MOUTAH, juriste politologue
Le Tchad à l’instar des autres pays africains est confronté par des conflits divers et variés depuis les indépendances, d’où la nécessité d’identifier les différents types de conflits que connait le Tchad préalablement, avant de chercher à identifier les situations conflictuelles qui risquent de dégénérer à tout moment et qui souvent se soldent par des morts d’hommes.
La problématique c’est : comment identifier les différents types de conflits et leurs causes en vue d’une prévention efficace afin d’éviter les conflits meurtriers ?
Avant de rentrer dans les vives du sujet, Qu’est-ce que le conflit ? Le conflit peut être définit de plus manière. Mais ici, dans le cadre de ce travail, le conflit : c’est tout désaccord entre deux ou plusieurs personnes basées sur l’intérêt personnel ou collectif, l’idéologie, l’identité culturelle ou la survie pouvant conduire à l’affrontement.
Selon Timothé Colas, il existe six (6) types de conflits à savoir : le conflit d’intérêt ; le conflit de pouvoir ; le conflit identitaire ; le conflit de valeur ; le conflit affectif et le conflit intellectuel.
Ici, nous allons nous en appesantir sur les différents types de conflits que connait le Tchad habituellement. Ainsi, nous avons :
  1. Le conflit armé (gouvernement/rébellion)
  2. Le conflit agriculteurs-éleveurs
  3. Le conflit intercommunautaire
  4. Le conflit agriculteurs-agriculteurs
  5. Le conflit éleveurs-éleveurs
  6. Le conflit entre les sous-groupes d’une même ethnie
  7. Les crises politiques : gouvernement/opposition politique
  8. La violence en milieu scolaire etc.
Les sources des conflits sont : l’impunité ; l’injustice ; la discrimination ; l’inégalité de chance ; l’exclusion ; le régionalisme ou le racisme ; le népotisme ; la lutte de positionnement ; accès à la terre ; accès aux pâturages ; accès à l’eau ; l’instrumentalisation du contexte de conflits agriculteurs-éleveurs parce que majoritairement les agriculteurs sont de confession chrétienne et les éleveurs de confession musulmane ; la mauvaise gouvernance ; l’accès aux ressources naturelles ; l’incitation à la haine.
Les causes et les sources de différents conflits au Tchad
Les causes et les sources de conflits au Tchad, comme dans d’autres pays d’Afrique sont multiples et variées selon que l’on se trouve dans une région  à une autre. Elles peuvent être volontaires. C’est-à-dire, du fait d’une personne physique à travers ses agissements ou actes ou du fait d’une personne morale, en l’occurrence l’Etat par le biais de ses démembrements dans les provinces, départements, sous-préfectures etc.
Elles sont aussi d’ordre involontaire. Autrement dit, du fait du bétail qui en détruisant les champs des agriculteurs par exemple, cela peut conduire au conflit entre agriculteurs-éleveurs.
Le conflit éleveurs-éleveurs : a pour cause et source l’accès à l’eau et le pâturage. Dans les zones sahariennes et sahéliennes, l’emplacement du lieu de l’abreuvoir peut constituer une source de conflit. La concentration du bétail près du point d’accès à l’eau constitue toujours une source de conflit, qui continue d’endeuiller les familles des éleveurs. Par exemple, dans la province du Lac, ce n’est pas l’eau qui est la source principale de conflit entre éleveurs. Mais, c’est l’insécurité qui prévaut dans la région à cause du terrorisme qui freine la transhumance et les éleveurs se trouvent à partager des zones de pâturage d’où les conflits surgissent souvent.
Les conflits intercommunautaires : ont pour causes l’accès à la terre et la prolifération des chefferies traditionnelles, qui à l’occasion de l’intronisation d’un nouveau chef de canton des conflits peuvent éclater dans certaines régions.
Le conflit agriculteurs-agriculteurs : a pour cause principale l’accès à la terre, en ce sens qu’un simple litige de portion de terre entre deux agriculteurs d’une même ethnie par exemple, peut conduire à l’affrontement, tout simplement les deux agriculteurs peuvent appartenir à différents sous-groupes d’une même ethnie, l’exemple de la province du Batha.
Le conflit armé : En Afrique en général et au Tchad en particulier, a pour cause la mauvaise gouvernance, qui a pour corollaire, toutes les sources de conflit citées ci-haut. La particularité du conflit, c’est que ses acteurs sont le gouvernement pour conserver son pouvoir et les rebelles pour renverser ledit gouvernement. Ce conflit est de loin, le conflit ayant le plus endeuillé le Tchad. Depuis plus de quatre décennies. Les belligérants ne trouvant pas d’ordre moyens que de recourir à la force ou la lutte armée.
Les crises politiques : ont pour conséquences les guerres civiles, conflits et les violations massives de droits de l’homme (restriction des libertés, arrestation, détentions, tortures etc.). La guerre civile de 1979 du Tchad et la crise politique ayant conduit aux événements douloureux du 20 octobre 2022 en sont une parfaite illustration. Ces crises politiques ont pour acteurs principaux le gouvernement et l’opposition politique.
L’impunité : ici, dans le cadre de ce thème, l’impunité concerne l’absence de la responsabilité pénale des auteurs des actes répréhensibles pour le cas des conflits (agriculteurs-éleveurs ; éleveurs-éleveurs ; agriculteurs-agriculteurs et voire même intercommunautaires). Sauf la réparation du dommage subi par la tierce partie. Une réparation basée sur la tradition dans laquelle, la réparation est assumée par la famille, le sous-groupe, voire par l’ethnie. La non dénonciation d’un proche auteur des actes répréhensibles complique davantage l’identification de ce dernier par les autorités judiciaires par exemple.
La discrimination, le régionalisme, le racisme : ont pour conséquence l’impartialité, en ce sens que, chaque partie estime qu’elle a raison ou droit plus que l’autre partie, ce qui envenime souvent la situation.
La lutte de positionnement : est aussi une source de conflit au Tchad, certaines pensent qu’ils sont supérieurs aux autres sur la base de leurs croyances ou leurs rangs sociales. Cette lutte, elle est idéologique, ethnique, culturelle, sociales etc.
La politique de la décentralisation de l’Etat : a impacté sur les autorités traditionnelles qui sont d’ailleurs des auxiliaires de l’administration publique. Notamment, l’Etat a dépossédé les autorités traditionnelles de leur marge de manœuvre dans le domaine de résolution des conflits. Malheureusement dans certains cas, elles sont réduites au rang des spectateurs d’un problème qui a éclaté chez elles, sans qu’elles puissent intervenir. Tout simplement, un conflit qui est géré traditionnellement par les autorités traditionnelles se trouve au niveau administratif (chez le gouverneur, préfet, sous-préfet ou le commandant de brigade).
La partialité des autorités traditionnelles : certaines autorités traditionnelles sont souvent partiales dans les situations pouvant conduire à l’affrontement. Cette partialité est caractérisée par la prise à partie d’un coté au détriment d’un autre par les autorités traditionnelles ne fait qu’aggraver la situation. D’où, les solutions à ces conflits ne sont ni équitables, ni pérennes, c’est ce qui explique en partie la survenance des conflits.
L’instrumentalisation du contexte de conflits agriculteurs-éleveurs parce que majoritairement les agriculteurs sont de confession chrétienne et les éleveurs de confession musulmane. Ce n’est plus un problème d’éleveurs-agriculteurs, mais  cela devient un problème religieux, ethnique et culturel.
Les solutions
  1. Chaque partie doit prendre ses responsabilités (gouvernement, autorités traditionnelles, les agriculteurs, les éleveurs, les politiciens etc.).
  2. Le dialogue comme outils de résolution de conflits.
  3. Définir un corridor de la transhumance afin de réduire le risque de conflit entre agriculteurs-éleveurs.
  4. La sensibilisation des acteurs concernés sur la dépendance entre éleveurs-agriculteurs.
  5. La promotion des valeurs ancestrales et de la culture de la paix au sein de la société.
  6. L’instauration des mécanismes de prévention des conflits : la prévention structurelle et la prévention opérationnelle.
  7. La mise en place d’un système d’alerte précoce et de suivi pour collecter les informations.
  8. Le renforcement de capacité des autorités administratives et traditionnelles sur les techniques de médiation et de négociation.
  9. Le rôle de la société civile à travers les campagnes de sensibilisation, les appels à la retenue.
  10. Cartographier les zones dites « foyer de tension ».
  11. Déterminer des zones exclusives pour les pâturages et les agricultures.
  12. Le conseil des sages (éleveurs-agriculteurs) pour anticiper toutes les crises et conflits.
  13. Valoriser le système de réparation de dommage en nature ou en espèce en cas de destruction des champs par les animaux.
  14. Vulgariser les mécanismes de réparation de l’ONDR (actuelle ANADER).
  15.  
BIBLIOGRAPHIE
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  • [[1]]url:#_ftnref1 SOUMAÏN ADOUM ABDOULAYE in Tchad : des guerres interminables aux conséquences incalculables
[[2]]url:#_ftnref2 Le Coach principal devait être le Ministère de la Femme mais hélas !
[[3]]url:#_ftnref3 Cf rapport Conférence Nationale Souveraine
[[4]]url:#_ftnref4 Femmes, Gouvernance endogène et Prévention des conflits en Afrique de l'Ouest in : »club du Sahel et de l’Afrique de l’OUEST3, 2006.
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