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www.centrerecherche.com
Siège : N'Djamena, Tchad
E-mail : yacoubahmat@aol.com
Ensemble contre les conflits et pour la paix

Dr. A. Yacoub appelle à l’intégration des centres de recherche dans les dispositifs de prévention des conflits climatiques

Samedi 25 Octobre 2025

Ahmat Yacoub a plaidé en faveur du renforcement des mécanismes de lutte contre la corruption afin d'orienter l'argent vers l'amélioration de la sécurité alimentaire. Il a demandé aux institutions financières et aux bailleurs de fonds de ne pas cautionner la corruption et d'en être complices dans le financement des projets visant à détourner l'argent.


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Date : 24/10/2025
Réf : CEDPE/PR/CC/214-1256/2025
Contact : 65031560 – watsup : 99860817
0033772438986
 Table ronde en marge du Forum de haut niveau de Tana sur la sécurité en Afrique - Ethiopie (24-26 octobre 2025)
Le nexus climat-environnement-sécurité en Afrique : perspectives des centres de recherche francophones pour des solutions en prise avec les réalités du terrain.   
Communication du Dr. Ahmat Yacoub Dabio
Président du CEDPE et membre du Consortium sur le Nexus climat–sécurité–environnement
Titre: Les centres de recherche francophones face à l’urgence climatique : quelles contributions concrètes ?
  1. Introduction
Mesdames et Messieurs, chers experts, Permettez-moi d’abord d’exprimer ma profonde gratitude à l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), dont l’engagement constant renforce les capacités des structures de recherche en Afrique francophone et nous permet de participer à des échanges stratégiques sur des enjeux cruciaux.
Je salue chaleureusement les représentants de l’OIF, de FrancoPaix, de Thinking Africa, du Centre tchadien d’études stratégiques, ainsi que tous les experts ici présents.
Contexte et trajectoire
Depuis 2021, le CEDPE[[1]]url:#_ftn1 collabore étroitement avec l’OIF[[2]]url:#_ftn2 sur des initiatives liées à la prévention des conflits, qu’ils soient extrémistes, intercommunautaires ou intracommunautaires. En 2021 -2022, nous avons travaillé sur un projet intitulé « Renforcement Institutionnel du CEDPE pour mieux prévenir l’extrémisme violent ». Entre 2022- 2023, avec le soutien financier et technique de l’OIF, nous avons conduit une étude approfondie sur le nexus climat–sécurité–environnement dans trois pays : le Tchad, la République centrafricaine et le Cameroun.
Pour garantir la rigueur scientifique et la portée régionale de cette initiative, nous avons mis en place un consortium regroupant huit institutions de recherche issues de quatre pays (Tchad, Cameroun, RCA, Égypte), sous la coordination du CEDPE. En septembre 2025, le Centre for Energy and Climate Change de Baz University (Nigeria) a rejoint le consortium, élargissant ainsi notre coopération vers l’Afrique anglophone. Je rappelle qu’en ce moment, nous travaillons sur « LE RENFORCEMENT DES CAPACITES SUR LE NEXUS CLIMAT - SECURITE – ENVIRONNEMENT EN AFRIQUE CENTRALE, projet soutenu par l’OIF et l’UNOCA.
  1. Leçons apprises
  1. L’absence de mécanismes de régulation : Le manque de coordination entre États, l’absence de dispositifs transfrontaliers, et la faible intégration des centres francophones dans les politiques publiques aggravent la vulnérabilité régionale.
  2. L’interdépendance des crises : Les phénomènes climatiques (sécheresse, variabilité des pluies, dégradation des sols) ne provoquent pas seulement des pertes agricoles — ils déclenchent des migrations forcées, des conflits agropastoraux, et des tensions intercommunautaires.
  3. La militarisation des acteurs locaux : Face à la raréfaction des ressources, les communautés agricoles et pastorales s’arment, rendant les conflits plus meurtriers et plus fréquents (ex. 43 morts au sud du Tchad, mai 2025).
  1. Lien entre climat, sécurité et environnement
Aspect Interaction observée dans l’étude Nexus
Climat Environnement Stress hydrique, dégradation des terres, perte de biodiversité
Environnement Sécurité Conflits autour des ressources, migrations, tensions intercommunautaires
Climat Sécurité Déplacement forcé des populations, militarisation des acteurs, instabilité régionale
 
  1. Climat, migration et sécurité : une interaction explosive
Le changement climatique engendre des impacts majeurs :
  • Hausse des températures
  • Variabilité des précipitations
  • Dégradation des terres
  • Stress hydrique croissant
Ces phénomènes affectent directement les ressources vitales des communautés locales, provoquant des migrations massives, souvent motivées par la recherche de meilleures conditions de vie. Mais cette mobilité, lorsqu’elle s’inscrit dans un contexte de rareté des ressources, peut devenir un facteur de tensions et de conflits, notamment entre agriculteurs, éleveurs et pêcheurs.
  1. Étude de terrain : le changement climatique comme facteur de conflit (pêcheur – agriculteur- éleveur)
Dans les trois pays étudiés (Tchad, Cameroun, RCA), nos recherches ont révélé :
  • Une pression croissante sur les ressources naturelles ;
  • Une transhumance plus profonde des éleveurs vers les zones agricoles ;
  • Une militarisation des acteurs agropastoraux ;
  • Une transformation des pratiques agricoles et pastorales : extension des surfaces cultivées, nouvelles formes de mobilité des troupeaux ;
Le changement climatique agit ainsi comme un accélérateur de conflits locaux, en exacerbant les tensions autour de l’accès à l’eau, aux terres et aux pâturages.
  1. Quelles contributions concrètes des centres francophones face à l’urgence climatique ?
Les centres de recherche francophones, malgré des moyens limités, jouent un rôle stratégique dans la compréhension et la réponse aux effets du changement climatique sur la sécurité en Afrique. Voici quelques axes d’intervention concrets :
1. Production de données et d’analyses contextualisées
  • Collecte de données locales sur les impacts climatiques et les dynamiques migratoires ;
  • Cartographie des zones à risque et des tensions agropastorales ;
  • Élaboration de scénarios prospectifs pour anticiper les crises.
 2. Renforcement des capacités et coopération régionale
  • Formation de jeunes chercheurs et experts en climat–sécurité ;
  • Création de plateformes francophones pour le partage de connaissances ;
  • Développement de partenariats Sud–Sud avec les centres anglophones et arabophones.
 3. Appui aux politiques publiques
  • Contribution à l’élaboration de stratégies nationales d’adaptation ;
  • Intégration des données scientifiques dans les plans de prévention des conflits ;
  • Dialogue avec les autorités locales pour une gouvernance inclusive des ressources.
4. Promotion de solutions durables
  • Valorisation des pratiques agroécologiques et de la gestion intégrée des ressources ;
  • Appui à des projets pilotes de reforestation, d’irrigation durable et d’alerte précoce ;
  • Sensibilisation des communautés aux enjeux climatiques et à la paix environnementale.
  1. Appel à l’action
Le changement climatique n’est pas un phénomène abstrait : il est vécu au quotidien par des millions de personnes partout au monde. Il exacerbe les vulnérabilités, alimente les tensions et menace la stabilité régionale. Il ne se contente pas d’altérer les écosystèmes : il redessine les équilibres sociaux, déplace les populations, et alimente des conflits de plus en plus complexes. Une approche intégrée du nexus climat–sécurité–environnement est désormais indispensable pour anticiper les crises et construire la résilience.
Les centres de recherche francophones, en prise directe avec les réalités du terrain, doivent être reconnus comme des acteurs stratégiques de la résilience climatique et de la prévention des conflits.
La science francophone ne doit plus être périphérique. Elle doit être centrale, visible, et soutenue. C’est pourquoi, au nom du CEDPE et du Consortium, nous appelons :
  • Les organisations internationales notamment l’UA, l’UE, les NU… à renforcer leur coopération sur le Nexus avec l’OIF afin de lui permettre à poursuivre et élargir son soutien structurel aux centres francophone ;
  • Les partenaires internationaux à financer les initiatives locales ;
  • Les États africains à s’ouvrir aux centres de recherche et à les intégrer dans leurs dispositifs de gouvernance climatique et à leur donner les moyens d’actions.
  1. Recommandations :
  2. L’intégration des centres de recherche dans les dispositifs de prévention des conflits climatiques :
  3. La création d’une plateforme panafricaine francophone de recherche-action sur le nexus climat–sécurité-Environnement, et leur sous-représentation dans les dispositifs internationaux.
  4. Le financement des centres locaux via des mécanismes directs, sans passer par des intermédiaires internationaux ;
  5. Le renforcement des bibliothèques et la valorisation des publications[[3]]url:#_ftn3 francophones dans les forums et bases de données internationales ;
  6. Le renforcement de la coopération régionale, des partenariats Sud–Sud entre centres francophones d’Afrique centrale, de l’Ouest et du Maghreb ;
  7. L’établissement et le soutien des plateformes régionales de coopération : créer des mécanismes formels pour la gestion des ressources transfrontalières, la résolution des conflits liés aux ressources naturelles et la réponse coordonnée aux crises environnementales.
  8. Impliquer la société civile notamment les centres d’études et de recherche, dans la gestion de conflits, les dialogues réguliers entre les États, les organisations régionales et les communautés locales, pour faciliter la gestion des ressources et permettre une réponse coordonnée aux défis climatiques et sécuritaires, réduisant ainsi les risques de conflits transfrontaliers (l’exemple du conflit soudanais).
  9. Accroître la résilience climatique (Développer des programmes de résilience climatique : mettre en œuvre des projets visant à améliorer la résilience des communautés face aux impacts du changement climatique, tels que la construction d'infrastructures résilientes, la promotion de pratiques agricoles durables, et l’amélioration des systèmes d’alerte précoce).
  10. La promotion d’une gestion intégrée des ressources : a) élaborer et appliquer des politiques de gestion intégrée des ressources naturelles, b) adopter des approches de gestion durable qui équilibrent les besoins des différents groupes tout en minimisant les conflits et les impacts environnementaux. C) encourager des pratiques telles que l’agroforesterie, le travail du sol de conservation et l’agriculture biologique. ;
  11. Augmentation de financement pour l’environnement a) réallouer des ressources financières vers des projets environnementaux et de gestion des conflits, b) prioriser le financement des initiatives environnementales et de gestion des risques plutôt que les dépenses militaires, c) explorer des opportunités de financement international et de partenariats pour soutenir ces projets ;
  12. Le renforcement des infrastructures a) mettre en place des réseaux d'eau potable capables de résister aux divers phénomènes climatiques tels que les températures élevées, les inondations et les crues, tout en coordonnant cette action avec les communautés locales, y compris les éleveurs ;
  13. La relance des projets de reforestation et de gestion des ressources en eau pour aider à stabiliser l'environnement et s’adapter au changement climatique ;
  14. Le renforcement des mécanismes de lutte contre la corruption et la promotion des valeurs démocratiques pour orienter l’argent vers l’amélioration de la sécurité alimentaire.
 
  1. Conclusion
La polycrise climatique[[4]]url:#_ftn4  ne se limite pas à des aléas météorologiques. Elle restructure les territoires, redistribue les populations, et alimente des conflits de plus en plus complexes. Une réponse efficace exige une lecture intégrée du nexus climat–sécurité–environnement, fondée sur les données du terrain et les savoirs locaux.
Le Consortium régional coordonné par le CEDPE, avec le soutien de l’OIF, a démontré la pertinence d’une recherche francophone ancrée dans les réalités du terrain. Nous appelons l’ensemble des parties prenantes à soutenir l’élargissement et la consolidation de cette initiative, afin de renforcer la contribution des centres francophones à la paix, à la sécurité et à la résilience climatique en Afrique.
Ce dialogue est urgent. Ce travail est essentiel. Ce soutien est stratégique.
Je vous remercie et je vous souhaite du succès.

Lire aussi 
1. Rapport d’Etude sur le nexus-climat-sécurité-environnement en Afrique centrale : cas du Cameroun, de la République centrafricaine et du Tchad