Le coup d’État militaire contre le président Patrice Talon a été déjoué de justesse grâce à l’intervention rapide du Nigéria, soutenu par la France qui a fourni un appui logistique, des moyens d’observation et de surveillance à la demande des autorités béninoises. Des avions de chasses en provenance de Lagos frappent à plusieurs reprises les positions des soldats mutins, réfugiés au camp militaire de Togbin, dans la capitale économique Cotonou.
Cette opération conjointe franco-nigériane a permis de contenir les mutins, mais les analyses diffusées dans les médias ont parfois pris des accents d’exagération. Ce qui est certain, c’est que les expériences malheureuses vécues par la France et la CEDEAO dans d’autres pays de la région les ont poussés à agir en alliés de circonstance. Leur objectif commun était d’éviter de perdre un partenaire stratégique dans un contexte régional marqué par l’instabilité. Selon une source diplomatique de la CEDEAO, le président français Emmanuel Macron aurait été plus pressé que l’organisation sous-régionale pour déclencher une intervention. À sa demande, le Nigéria aurait bombardé la base de retranchement des putschistes, après qu’ils se soient retirés de la télévision nationale.
À la suite de cette opération, un contingent de deux cents soldats mandatés par la CEDEAO – principalement du Nigéria, de la Côte d’Ivoire et de la Sierra Leone – a été déployé au Bénin pour neutraliser les éléments rebelles que le Nigéria n’avait pas réussi à éradiquer.
Certaines sources avancent que si le coup d’État a pris du temps à être maîtrisé, c’est parce que le président Talon aurait été lâché par une partie significative de son armée. Ce sont donc des forces étrangères qui assureraient aujourd’hui son maintien au pouvoir. Or, l’histoire récente de la région montre que les armées putschistes, dans 99 % des cas, échouent à respecter leurs promesses de transition. Elles modifient les constitutions pour se maintenir au pouvoir et consacrent leurs énergies à combattre des ennemis fictifs plutôt qu’à développer leurs pays.
Au Bénin, l’armée n’avait guère de justification pour renverser un président qui, après deux mandats, a promis de quitter le pouvoir par la grande porte à l’issue des élections prévues en avril 2026. Toutefois, il est vrai que les soldats déployés sur le front sont marginalisés, mal équipés et vivent dans des conditions précaires, tout comme leurs familles. Par ailleurs, l’exclusion de certains partis politiques et l’éviction de leaders de la scène électorale nourrissent un climat de frustration.
Ce qui doit inquiéter aujourd’hui le Bénin, la CEDEAO et la France, c’est le sort des putschistes qui ont échappé aux opérations. Le gouvernement béninois affirme avoir arrêté des ressortissants maliens, nigériens et burkinabè. Cette donnée est sensible car les populations du nord du Bénin partagent des liens ethniques avec celles des pays membres de l’Alliance des États du Sahel (AES), ce qui peut alimenter des manipulations et des tensions communautaires.
Si les vrais auteurs du coup ne sont pas neutralisés, ils pourraient trouver refuge auprès de la communauté de l’AES et constituer une rébellion armée. Dans ce scénario, Patrice Talon serait sauvé, mais le Bénin, lui, resterait exposé à une instabilité chronique.
Dr. Ahmat Yacoub Dabio
Expert en gestion de crises complexes et interdépendantes Président du Centre d'Etudes pour le Développement et la Prévention de l'Extrémisme (CEDPE)
Président de Liberté Sans Frontière (LSF) -
Point Focal du Réseau des organisations de la société civile du Bassin du Lac Tchad/ Tchad
Membre de l'Association Internationale des sociologues de langue française (AISLF)
Ancien Conseiller chargé de Mission du Médiateur de la République
Tel/Watsup: 00250796518396
00 235 99860817
standard: 0023592335316
www.centrerecherche.com


